2 Septembre 2014

Mission

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objectifs scientifiques

La Terre, comme tous les corps du système solaire, est plongée dans le vent solaire, plasma complètement ionisé et sans collision, formé essentiellement de protons et d'électrons. Il se propage radialement depuis le Soleil à une vitesse supersonique d'environ 400 km/s. A l'approche de l'obstacle que constitue la planète, se forme un choc. La Terre a un champ magnétique à peu près dipolaire. Ce champ est déformé par la pression du vent solaire, aplati dans la direction du Soleil (côté jour) et fortement étiré dans la direction antisolaire (côté nuit). La cavité ainsi créée autour de la planète, la magnétosphère, a une frontière avec le vent solaire, la magnétopause. Vers la terre, elle est limitée par l'ionosphère, couche de gaz partiellement ionisée issue de l'atmosphère. La magnétosphère est, elle aussi, remplie de plasma, issu de l'ionosphère et du vent solaire. Sans collision et complètement ionisé comme le vent solaire, il a des caractéristiques différentes et sa dynamique est contrôlée par le champ magnétique de la planète. En bref, le système vent solaire - magnétosphère comprend des régions différenciées - la physique de ces différents milieux et surtout celle de leurs interactions est loin d'être complètement comprise, malgré les résultats déjà obtenus.

En effet les missions spatiales de recherches magnétosphériques souffraient, jusqu'à présent, d'un lourd handicap : elles ne mettaient en œuvre, dans une région donnée, qu'un seul satellite. Cette stratégie, qui est bien adaptée à l'exploration, c'est à dire à la cartographie d'un milieu supposé stationnaire dans le temps, s'avère illusoire lorsqu'il s'agit de processus turbulents qui se développent dans un milieu qui peut évoluer rapidement, comme lors de l'interaction entre le vent solaire et le champ magnétique terrestre. Grâce à un concept original, le projet Cluster de l'Agence Spatiale Européenne doit permettre de pallier cette difficulté : Cluster comporte 4 satellites identiques disposés en forme de tétraèdre. Avec ses 4 satellites, Cluster permettra pour la première fois d'étudier en 3 dimensions les processus physiques qui prévalent dans les régions d'interface entre le vent solaire et le plasma magnétosphérique et de séparer les effets spatiaux des effets temporels.

La magnétopause, qui entoure la région où le champ magnétique terrestre domine, forme théoriquement une frontière étanche, mais le plasma du vent solaire pénètre partiellement à l'intérieur de la magnétosphère. Comment ? On pourra étudier les transferts de masse, d'énergie et de moment cinétique à travers la magnétopause, mais aussi les autres frontières : onde de choc, cornets polaires, ainsi que la région de la queue magnétosphérique. Dans des plasmas sans collision - comme c'est le cas du vent solaire et du plasma magnétosphérique - seules des ondes ou de la turbulence peuvent assurer la thermalisation des particules ou l'échange d'énergie entre différentes populations de particules. Il faut pour ces études disposer d'un ensemble homogène de paramètres : mesures électromagnétiques (champs magnétique et électrique et leurs fluctuations, ondes), composition du milieu (particules), densité, vitesse moyenne et pression du plasma (le milieu est totalement ionisé) ainsi que - et c'est essentiel - les gradients de ces quantités qui sont les moteurs du système magnétosphérique.

La liste ci-dessous d'objectifs scientifiques, associés aux régions clés qui seront traversées par Cluster, est issue de l'étude de phase A de l'ESA (décembre 1985). Cluster II étant toujours la première mission comportant 4 points de mesure identiques et coordonnés, ces objectifs sont toujours à l'ordre du jour :

  • Physique des régions frontières entre deux plasmas cosmiques, et processus de transfert de masse, énergie et impulsion à travers la frontière, telle que reconnexion magnétique (magnétopause du côté jour, cornets polaires)
  • Processus d'accélération du plasma se produisant lors de périodes de reconfiguration des champs électromagnétiques (queue géomagnétique)
  • Etude de la turbulence, de la formation de vortex et de la diffusion (vent solaire, cornets polaires, magnétopause et couche limite de la couche de plasma dans la queue)
  • Structure et propriétés des chocs sans collision, en particulier étude des accélérations de particules et des mécanismes de génération d'ondes associés (choc amont de la Terre, chocs interplanétaires)
  • Microstructure des ondes et des particules dans le vent solaire, exemple de vent stellaire.

L'augmentation de la capacité des mémoires de bord de Cluster II par rapport à Cluster permettra d'obtenir une meilleure couverture orbitale allant jusqu'à la possibilité d'enregistrer les données de toute une orbite. Ainsi plusieurs études complémentaires pourront être abordées de manière nouvelle grâce à une vue multipoint de la magnétosphère interne, bien que la configuration tétrahédrique soit déformée aux basses altitudes: analyse des sources électromagnétiques, transferts de matières, processus liés à l'activité aurorale (magnétosphère interne, plasmasphère, lignes aurorales).

La distance intersatellitaire sera adaptée aux dimensions caractéristiques des régions clé traversées (un réajustement est prévu tous les 6 mois), et le choix de la région de l'orbite où la flotte sera en position tétraédrique sera optimisée.

Historique de la Mission

Le projet Cluster est officiellement né en février 1983 à l'Agence Spatiale Européenne (ESA) lors d'une réunion de démarrage d'une phase d'étude ("Assessment Study ") regroupant des scientifiques et ingénieurs européens (dont une forte composante scientifique française et allemande). Cette phase avait été précédée par de nombreuses études menées principalement en France depuis la fin des années 1970.

Le projet a ensuite franchi avec succès toutes les étapes de décision pour finalement devenir conjointement avec le projet solaire SOHO la première "pierre angulaire" du programme Horizon 2000 de l'ESA.

La sélection de la charge utile a été entérinée par le Comité des Programmes Scientifiques de l'ESA en 1988.

Le lancement du 4 juin 1996 s'est soldé malheureusement par un échec dû à un mauvais fonctionnement du lanceur (premier vol de qualification d'Ariane 5).

A la suite de la résolution adoptée par son Comité des Programmes Scientifiques du 3 avril 1997, l'ESA a décidé, en accord avec la communauté scientifique internationale, de relancer une mission Cluster appelée Cluster II, avec 4 satellites et des instruments identiques à ceux de la mission initale, dans le but de remplir les objectifs scientifiques prévus dans la première pierre angulaire du programme Horizon 2000.